Dans deux espèces qui lui étaient soumises, la Cour de cassation refuse
l’exequatur de jugements prononçant l’adoption d’un enfant par un couple
homosexuel:
- dans la première espèce (n°11-30261), l’adoption de l’enfant avait été prononcée par un jugement britannique. Le couple vivait en Grande-Bretagne, l’un des deux parents était français ;
- dans la seconde espèce (n°11-30262), l’adoption avait été prononcée par un juge canadien. Le couple résidait au Canada et chacun des deux membres avait la double nationalité franco-canadienne.
Alors que le tribunal de grande instance de Paris avait refusé l’exequatur
dans les deux cas, la cour d’appel l’avait ordonnée au motif que la
décision étrangère qui prononçait l’adoption ne méconnaissait aucun principe
essentiel du droit français ou d’une procédure étrangère et ne portait pas
atteinte à l’ordre public international.
La Cour
de cassation rappelle
qu’ « est contraire à un principe essentiel du droit
français de la filiation, la reconnaissance en France d'une décision étrangère
dont la transcription sur les registres de l'état civil français, valant acte
de naissance, emporte inscription d'un enfant comme né de deux parents du même
sexe ».
Selon la Cour de cassation, deux
textes ont été violés par la cour d’appel :
- « nul
ne peut être adopté par plusieurs personnes si ce n'est par deux époux, de
sorte qu'en reconnaissant l'adoption conjointe par deux personnes non mariées,
la cour d'appel a violé l'article 346 du code civil, dont les dispositions relèvent
de l'ordre public international français » ;
- « le juge doit vérifier que sa
décision pourra être exécutée et qu'elle ne conduit pas à créer une obligation
juridique subséquente sur le territoire national, qui serait elle-même contraire
à l'ordre public ; qu'en l'espèce, l'exequatur de la décision canadienne
devrait conduire à la transcription de l'adoption sur les registres de l'état
civil français, valant acte de naissance, dans lequel l'enfant sera dit être né
de deux parents du même sexe, heurtant ainsi les dispositions d'ordre public
relatives à la filiation, qui interdisent l'établissement conjoint de la
filiation par deux personnes du même sexe ; qu'en accordant l'exequatur, la
cour d'appel a violé l'article 509 du code de procédure civile ensemble les
principes essentiels du droit français régissant l'établissement de la
filiation ».
Rappelons que le conseil constitutionnel
a considéré dans une décision du 6 octobre 2010 (clic) que l'interdiction de l'adoption
d'un enfant par la compagne de sa mère n'était pas contraire à la Constitution
et que la Cour européenne des droits de l’Homme, dans un arrêt du 15 mars 2012(clic) n’a pas jugé discriminatoire le refus d’adoption simple de l’enfant par la
compagne de la mère.
Civ. 1re, 7 juin 2012, n°11-30261 (clic) et n°11-30062 (clic)
Civ. 1re, 7 juin 2012, n°11-30261 (clic) et n°11-30062 (clic)
Commentaires dans les revues : D. 2012, Jur. p. 1992, note D. Vigneau.