vendredi 22 février 2013

Les dispositions de l’avant-projet de loi portant diverses dispositions relatives au droit de la famille



Le Figaro a publié il y a quelques jours le texte de l'avant projet de loi sur le droit de la famille. le document est consultable ici (clic)

J'ai comparé le texte proposé avec les dispositions actuelles du Code civil et apporté des commentaires succincts. Les textes encadrés sont ceux découlant du projet. Dans certains cas, le texte souligné met en valeur le changement opéré dans le texte. 

Même si le texte permet la prise en compte dans plusieurs domaine d'une pratique ou d'un besoin, il reste modeste et ne montre pas l'ambition qu'on lui a prêté un temps (on a parlé de "grande réforme du droit de la famille". 

Les actes usuels

L’avant projet apporte une clarification relativement à la notion d’actes usuels et d’actes important de l’autorité parentale.

« Art. 372-2. - Tout acte de l'autorité parentale, qu’il ait un caractère usuel ou important, requiert l'accord des parents lorsqu’ils exercent en commun l'autorité parentale.
« A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale ou qu'il autorise un tiers à accomplir un tel acte.
«Sont considérés comme importants les actes qui engagent l'avenir de l'enfant ou qui touchent à ses droits fondamentaux. Tel est le cas du changement de domicile de l’enfant, dès lors qu’il modifie les droits de visite et d'hébergement de l’autre parent ou les modalités de la résidence alternée. »

Il précise en préambule le principe selon lequel les actes de l’autorité parentale, usuels ou importants, requièrent l’accord des deux parents.

Le texte précise à quelles conditions les actes usuels peuvent être accomplis par un seul parent. L’aliéna 2 de cet article introduit une présomption :un parent qui accompli un acte usuel ou le tiers qui a été autorisé par un parent à l’accomplir est réputé agir avec l’accord de l’autre parent.

Dans un 3e alinéa, l’article 372-2 définit les actes importants, par opposition aux actes usuels : il s’agit de ceux qui « engagent l'avenir de l'enfant ou qui touchent à ses droits fondamentaux ». Un exemple d’acte particulièrement important, nécessitant donc l’accord exprès des deux parents, est donné in fine : il s’agit « du changement de domicile de l’enfant, dès lors qu’il modifie les droits de visite et d'hébergement de l’autre parent ou les modalités de la résidence alternée. »

Le partage de l’autorité parentale/le statut du beau-parent

L’avant-projet de loi modifie le titre de la section 3 du chapitre du code civil relatif à l’autorité parentale : dénommé jusqu’ici « De la délégation de l’autorité parentale », il devient « Du partage et de la délégation de l’autorité parentale ». La procédure de délégation de l’autorité parentale subsiste mais s’y ajoute une procédure de partage de l’autorité parentale. Les articles concernant le partagent précèdent ceux relatifs à la délégation d’où un déplacement des textes relatifs à la délégation de l’autorité parentale. Ainsi l’article 377 actuel du Code civil est déplacé à l’article 377-2 où il est reproduit à l’identique.

Art. 376. - Aucune renonciation, aucune cession portant sur l'autorité parentale, ne peut avoir d'effet, si ce n'est en vertu d'un jugement dans les cas déterminés ci-dessous.
Art. 376-1. - Un juge aux affaires familiales peut, quand il est appelé à statuer sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ou sur l'éducation d'un enfant mineur ou quand il décide de confier l'enfant à un tiers, avoir égard aux pactes que les père et mère ont pu librement conclure entre eux à ce sujet, à moins que l'un d'eux ne justifie de motifs graves qui l'autoriseraient à révoquer son consentement.
Art. 376-2. - La présomption d’accord prévue par l'article 372-2 est applicable aux actes usuels de l’autorité parentale accomplis par le tiers qui exerce l'autorité parentale.
Le juge peut être saisi des difficultés nées de l'exercice partagé ou délégué de l'autorité parentale par le parent, par le tiers visé aux articles 377 et 377-2 ou par le ministère public. Il statue conformément aux dispositions de l'article 373-2-11. »
Art. 376-3. - Le droit de consentir à l'adoption du mineur n'est jamais délégué ou partagé
Art. 377. - Le parent qui exerce seul l'autorité parentale peut  saisir le juge aux affaires familiales, afin de faire homologuer la convention par laquelle il organise le partage de tout ou partie de l’exercice de cette autorité parentale avec un tiers. 
L’avis de l’autre parent doit être recueilli.
Art. 377-1. – Le partage prend fin par une convention homologuée par le juge ou, en cas désaccord par un jugement, à la demande du tiers ou de l’un des parents.
Si elle émane du parent qui exerce l’autorité parentale, le juge fait droit à la demande sauf circonstances exceptionnelles.
Art. 377-2. - Les parents, ensemble ou séparément, peuvent, lorsque les circonstances l'exigent, saisir le juge en vue de voir déléguer tout ou partie de l'exercice de leur autorité parentale à un tiers, membre de la famille, proche digne de confiance, établissement agréé pour le recueil des enfants ou service départemental de l'aide sociale à l'enfance.
En cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l'impossibilité d'exercer tout ou partie de l'autorité parentale, le particulier, l'établissement ou le service départemental de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l'exercice de l'autorité parentale.
Dans tous les cas visés au présent article, les deux parents doivent être appelés à l'instance. Lorsque l'enfant concerné fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative, la délégation ne peut intervenir qu'après avis du juge des enfants. »
Art. 377-3. - La délégation pourra, dans tous les cas, prendre fin ou être transférée par un nouveau jugement, s'il est justifié de circonstances nouvelles.
Dans le cas où la restitution de l'enfant est accordée aux père et  mère, le juge aux affaires familiales met à leur charge, s'ils ne sont indigents, le remboursement de tout ou partie des frais d'entretien.

Les articles 376 et 376-1 du Code civil restent identiques.Un article 376-2 est introduit relativement à la présomption d’accord sur les actes usuels dont bénéficiera également le tiers bénéficiaire du partage de l’autorité parentale. Il existera entre ce tiers et le parent la même présomption d’accord pour les actes usuels et les mêmes limitations quant aux actes importants que pour les parents.L’article 376-3 dispose que «  Le droit de consentir à l'adoption du mineur n'est jamais délégué ou partagé » ». Il reprend la formulation de l’article qui était déjà applicable à la délégation de l’autorité parentale et étend ce principe au partage de celle-ci.

Quelles sont les conditions du partage de l’autorité parentale ?

Le partage de l’autorité parentale ne peut être envisagé que dans l’hypothèse où le parent qui la sollicite exerce seul l’autorité parentale. L’avis de l’autre parent devra être sollicité. Les conditions sont restrictives. Après une séparation, l’exercice de l’autorité parentale demeure en principe conjoint. Les cas dans lesquels le partage sera possible sont donc limités.En revanche, il sera possible à un concubin(e) ou partenaire homosexuel(le) de partager avec l'autre l'autorité parentale sur l'enfant. La mesure n'est néanmoins pas tout à fait satisfaisante dans ces cas là dans la mesure où il peut être mis fin à ce partage à l'initiative du parent (voir ci dessous).

Quelle est la procédure à suivre ?

Le parent doit saisir le juge aux affaires familiales afin d’ homologuer la convention qui organise le partage de tout ou partie de l’autorité parentale avec un tiers.

Comment le partage prend-il fin ?

Le partage de l’autorité parentale peut prendre fin de deux manières :
- le parent et le tiers sont d’accord  pour mettre fin au partage : le partage prend fin par homologation d’une convention par le juge ;
- en cas de désaccord entre le parent et le tiers : le partage prend fin par jugement. Si la demande émane du parent, « le juge doit faire droit à sa demande sauf circonstance exceptionnelles ».

Le délaissement parental

« Section 5 : De la déclaration judiciaire d’abandon
Art. 381-1 – Un enfant est considéré comme délaissé lorsque ses parents n’ont contribué par aucun acte à son éducation ou à son épanouissement pendant une durée d’un an.
Art. 381-2 L’enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l’aide sociale à l’enfance, délaissé par ses parents pendant l’année qui précède l’introduction de la demande en déclaration d’abandon est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance, sans préjudice des dispositions du troisième alinéa. La demande en déclaration d’abandon est obligatoirement transmise par le particulier, l’établissement ou le service de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant délaissé par ses parents. La demande peut également être présentée par le ministère public agissant d’office ou, le cas échéant, sur proposition du juge des enfants.
La simple rétractation du consentement à l’adoption, la  demande de nouvelles ou l’intention exprimée mais non suivie d’effet de reprendre l’enfant ne sont pas suffisantes pour rejeter de plein droit une demande en déclaration d’abandon. Ces démarches n’interrompent pas le délai figurant au premier alinéa.
L’abandon n’est pas déclaré si, au cours du délai fixé au premier alinéa, un membre de la famille a demandé à assumer la charge de l’enfant et si cette demande est jugée conforme à l’intérêt de ce dernier. Lorsqu’il déclare l’enfant abandonné, le tribunal délègue par la même décision les droits d’autorité parentale sur l’enfant au particulier, à l’établissement ou au service de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou à qui ce dernier a été confié.
La tierce opposition n’est recevable qu’en cas de dol, de fraude ou d’erreur sur l’identité de l’enfant.

L’article 350 du Code civil relatif à la déclaration judicaire d’abandon est déplacé : il devient, avec quelques modifications, l’article 381-2 du Code civil.  Alors que l’article se trouvait dans la section relative à l’adoption plénière et donc dans le titre relatif à la filiation, il est créé une nouvelle section au sein du chapitre  compris dans le titre relatif à l’autorité parentale : « Section 5. De la déclaration judiciaire d’abandon ». 

Deux articles sont créés dans cette section intitulée : l’article 381-1 définit le délaissement comme le fait pour les parents de ne pas avoir « contribué par aucun acte à son éducation ou à son épanouissement pendant une durée d’un an » et l’article 382-2 reprend quasiment in extenso les dispositions de l’ancien article 350, substituant l’expression d’enfant délaissé à celle d’enfant dont les parents se sont manifestement désintéressé. L’article 347 du Code civil et l’article L 224-4 du CASF sont modifié afin de faire référence à l’article 381-1 au lieu de l’article 350 (enfant adoptables/enfants pupilles de l’Etat).

Le mariage

L’article 74 du Code civil est modifié pour permettre le mariage des futurs époux non seulement dans la commune où l’un d’eux a son domicile ou sa résidence mais également dans celle où le parent de l’un des deux époux a son domicile ou sa résidence. Il s’agit de prendre en compte une pratique très répandue. L’article 165 est également modifié dans le même sens.

Art. 74, C. civ. : Le mariage sera célébré dans la commune où l'un des deux époux ou le parent de l’un des deux époux aura son domicile ou sa résidence établie par un mois au moins d'habitation continue à la date de la publication prévue par la loi
Art. 165 C. civ. : Le mariage sera célébré publiquement devant l'officier de l'état civil de la commune où l'un des époux ou le parent de l’un d’eux aura son domicile ou sa résidence à la date de la publication prévue par l'article 63, et, en cas de dispense de publication, à la date de la dispense prévue à l'article 169 ci-après.

L’article 75, alinéa 1er du Code civil est modifié : il n’impose plus la lecture de l’article 220 du Code civil par l’officier d’état civil lors de la célébration civile du mariage.

Art. 75 C . civ. : Le jour désigné par les parties, après le délai de publication, l'officier de l'état civil, à la mairie, en présence d'au moins deux témoins, ou de quatre au plus, parents ou non des parties, fera lecture aux futurs époux des articles212, 213 (alinéas 1er et 2), 214 (alinéa 1er), 215 (alinéa 1er) du présent code. Il sera également fait lecture de l'article371-1.

La prestation compensatoire

Le texte relatif au versement de rentes viagères qui étaient versées avant la réforme de 2000 relative à la prestation compensatoire est modifié : il sera désormais tenu compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé lors d’une demande de révision, de suspension ou de suppression de la rente.

Art. 33-VI, al. 1er de la loi n°2204-439 du 26 mai 2004 relative au divorce :  Les rentes viagères fixées par le juge ou par convention avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce peuvent être révisées, suspendues ou supprimées à la demande du débiteur ou de ses héritiers lorsque leur maintien en l'état procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil. A ce titre, il pourra être tenu compte de la durée de versement de la rente et du montant déjà versé.

Le divorce

Une partie de l’alinéa 1er de l’article 267 du Code civil, le juge n’est plus tenu d’ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux à défaut de convention entre les époux.

Version actuelle
Version à venir
Art. 267, C. civ. : A défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Il statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou d'attribution préférentielle.
Il peut aussi accorder à l'un des époux ou aux deux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.
Si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255 contient des informations suffisantes, le juge, à la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les désaccords persistant entre eux
Art. 267, C. civ. : A défaut d’un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, statue, s’il y a lieu, sur les demandes de maintien dans l’indivision ou d’attribution préférentielle.
Il peut aussi accorder à l'un des époux ou aux deux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.
Si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255 contient des informations suffisantes, le juge, à la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les désaccords persistant entre eux.

L’état civil

- Acte de naissance de l’enfant né sous X

Dans le l’article 58 reproduit ci-dessous, la partie souligné est supprimé c’est-à-dire que les dispositions relatives à l’élaboration de l’acte de naissance d’un enfant trouvé ne sont plus applicables aux enfants nés sous X.


Art. 58, C. civ. : Toute personne qui aura trouvé un enfant nouveau-né est tenue d'en faire la déclaration à l'officier de l'état civil du lieu de la découverte. Si elle ne consent pas à se charger de l'enfant, elle doit le remettre, ainsi que les vêtements et autres effets trouvés avec lui, à l'officier de l'état civil.
Il est dressé un procès-verbal détaillé qui, outre les indications prévues à l'article 34 du présent code, énonce la date, l'heure, le lieu et les circonstances de la découverte, l'âge apparent et le sexe de l'enfant, toute particularité pouvant contribuer à son identification ainsi que l'autorité ou la personne à laquelle il est confié. Ce procès-verbal est inscrit à sa date sur les registres de l'état civil.
A la suite et séparément de ce procès-verbal, l'officier de l'état civil établit un acte tenant lieu d'acte de naissance. En plus des indications prévues à l'article 34, cet acte énonce le sexe de l'enfant ainsi que les prénoms et nom qui lui sont donnés ; il fixe une date de naissance pouvant correspondre à son âge apparent et désigne comme lieu de naissance la commune où l'enfant a été découvert.
Pareil acte doit être établi, sur déclaration des services de l'assistance à l'enfance, pour les enfants placés sous leur tutelle et dépourvus d'acte de naissance connu ou pour lesquels le secret de la naissance a été réclamé.
Les copies et extraits du procès-verbal de découverte ou de l'acte provisoire de naissance sont délivrés dans les conditions et selon les distinctions faites à l'article57 du présent code.
Si l'acte de naissance de l'enfant vient à être retrouvé ou si sa naissance est judiciairement déclarée, le procès-verbal de la découverte et l'acte provisoire de naissance sont annulés à la requête du procureur de la République ou des parties intéressées.

- Mention de l’âge des époux dans l’acte de mariage

La mention de l’âge des époux dans l’acte de naissance n’est plus exigée par l’article 76-1° du Code civil.