mardi 10 décembre 2013

Civ. 1re, 25 septembre 2013 (n° 12-21569) : le droit viager d’habitation se limite au logement occupé à l’époque du décès


Au décès de son mari, une épouse réclame le bénéfice du droit viager d’habitation sur les deux lots de copropriété d’un immeuble, qui appartenaient en propre à son mari. Ces lots sont composés d’un appartement au rez-de-chaussée, qu’elle habite, et d’un studio situé au premier étage, occupé déjà du vivant du défunt par sa fille et le compagnon de celle-ci. La veuve fait assigner les deux enfants du défunt afin de voir juger que ce droit viager d'habitation portait non seulement sur l'appartement du rez-de-chaussée mais également sur celui du premier étage.

La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir limité ce droit d’habitation au seul appartement du rez-de-chaussée qu’elle occupait au moment du décès avec le défunt. En effet, l’article 764 du Code civil dispose que « Sauf volonté contraire du défunt exprimée dans les conditions de l'article 971, le conjoint successible qui occupait effectivement, à l'époque du décès, à titre d'habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement, jusqu'à son décès, un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier, compris dans la succession, le garnissant ». La Cour de cassation en déduit que « les lots litigieux, dépendant totalement de la succession, étaient distincts et que seul le n° 6, au rez-de-chaussée, était effectivement occupé à titre d'habitation principale par le défunt et son épouse à l'époque du décès tandis que l'autre, le n° 8, constitutif d'un studio indépendant et non attenant, qui n'est nullement l'accessoire du logement du rez-de-chaussée, a été investi par sa fille et le compagnon de celle-ci du vivant du défunt [....] les droits viagers de l'article 764 code civil étaient limités au lot du rez-de-chaussée »


En complément des ouvrages suivants : 

   

Crim., 6 novembre 2013 (n°13-85658) : le respect du principe du contradictoire devant la chambre de l’instruction


Un prévenu forme une demande de mise en liberté que le juge des libertés et de la détention (JLD) rejette. Le prévenu interjette appel de ordonnance du JLD devant la chambre de l’instruction qui, contre les réquisitions du Ministère public, informe la décision du JLD et place le prévenu sous contrôle judiciaire. La chambre de l’instruction fondait sa décision sur une confrontation organisée par le juge d’instruction et dont elle s’était fait communiquer le procès verbal en cours de délibéré, pendant laquelle un témoin entendu sous anonymat, qui avait initialement désigné le prévenu comme l’auteur des violences, l’avait finalement mis hors de cause.

La Cour de cassation casse, sur le fondement de l’article 197 du Code de procédure pénale, qui dispose dans son troisième alinéa que pendant le délai minimum de quarante-huit heures en matière de détention provisoire, et de cinq jours en toute autre matière, qui doit être observé entre la date d'envoi de la lettre recommandée de convocation à l'audience et celle de l'audience, «  le dossier est déposé au greffe de la chambre de l'instruction et tenu à la disposition des avocats des personnes mises en examen et des parties civiles dont la constitution n'a pas été contestée ou, en cas de contestation, lorsque celle-ci n'a pas été retenue ».La Cour de cassation estime que « si la chambre de l'instruction, lors de l'examen d'une voie de recours, peut fonder sa décision sur une pièce nouvelle ne figurant pas au dossier déposé au greffe, c'est à la condition de l'avoir préalablement soumise au débat contradictoire ».


En complément des ouvrages suivants : 

lundi 9 décembre 2013

Crim., 6 novembre 2013 (n°13-84320) : un mineur doit être placé en garde à vue dès lors qu'il est interrogé dans un commissariat ou une gendarmerie


Dans un arrêt rendu le 6 novembre 2013, la chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle que, dès lors qu’un « mineur, conduit par les policiers auprès d'un officier de police judiciaire pour être entendu sur une infraction qu'il était soupçonné d'avoir commise, se trouvait nécessairement dans une situation de contrainte et devait bénéficier des droits attachés au placement en garde à vue ». En l’espèce, le mineur avait été remis aux policiers par la directrice de son foyer d’accueil, suite à une plainte d’une éducatrice dénonçant des coups et des menaces. Les policiers l’avaient alors conduit au commissariat sans qu’il s’y oppose et sans que des mesures d’entrave soient nécessaires. Il avait ensuite quitté librement les locaux de police après son audition sans même en aviser les forces de l’ordre, depuis la salle d’attente.


Dans les revues :  D. 2013, AJ, p. 2646, D. 2013, Jur. p. 2826, note P. Hennion-Jacquet.

En complément des ouvrages suivants : 

mardi 3 décembre 2013

Présentation de la méthode d’élaboration du projet de loi sur la famille


Le 21 octobre 2013, Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la Famille, a présenté la méthode d'élaboration du projet de loi sur la famille.

La ministre a présenté sa méthodologie : les travaux préparatoires s'appuieront sur les travaux du Conseil économique, social et environnemental (CESE) sur « les évolutions contemporaines de la famille et leurs conséquences en matière de politiques publiques » rendu public le 22 octobre et sur un rapport du Haut conseil à la famille sur les « ruptures et recompositions familiales » ainsi qu'un rapport du groupe de travail organisé par les ministères de la Justice et de la Famille sur « l'exercice de la coparentalité après la séparation » qui doit être rendu début décembre.

Des groupes de réflexion ont été constitués autour de 4 axes :

- La médiation familiale et les contrats de co-parentalité ;
- De nouveaux droits pour les enfants ;
- Protection de l'enfance et adoption ;
- Filiation, origines, parentalité.


En complément des ouvrages suivants : 

Civ. 1re, 11 septembre 2013 (n° 12-16862) : la faute d’un époux doit rendre intolérable le maintien de la vie commune pour être une cause de divorce


Dans un arrêt du 11 septembre 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle que pour constituer une cause de divorce, la faute prévue à l’article 242 du Code civil doit rendre intolérable le maintien de la vie commune. La Cour de cassation approuve par conséquent la cour d’appel d’avoir considéré qu’une lisiason extra-conjugale du mari survenue plus de 8 ans après la séparation de fait des époux ne pouvait être considérée comme rendant intolérable le maintien de la vie commune.


En complément des ouvrages suivants : 

Décret n° 2013-958 du 25 octobre 2013 portant application des dispositions de l'article préliminaire et de l'article 803-5 du code de procédure pénale relatives au droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales


La loi n°2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France. a permis la transposition de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil relative au droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales.

La loi du 5 août 2013 a modifié l'article préliminaire du Code de procédure pénale dont le III s’est enrichi d’un nouvel alinéa prévoyant, concernant la personne suspectée ou poursuivie, que « Si cette personne ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu'elle comprend et jusqu'au terme de la procédure, à l'assistance d'un interprète, y compris pour les entretiens avec son avocat ayant un lien direct avec tout interrogatoire ou toute audience, et, sauf renonciation expresse et éclairée de sa part, à la traduction des pièces essentielles à l'exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être remises ou notifiées en application du présent code ».

En outre, la loi a modifié l'article 803-5 du Code de procédure pénale, qui prévoit désormais que l'autorité qui procède à l'audition d'une personne suspectée ou poursuivie, ou devant laquelle cette personne comparaît, vérifie qu'elle parle et comprend le français. A titre exceptionnel, il peut être effectué une traduction orale ou un résumé oral des pièces essentielles de la procédure.

Afin de mettre en œuvre ces modifications, le décret instaure, à la suite de l'article D. 593 du Code de procédure pénale, un chapitre intitulé «  Des modalités d'exercice du droit à l'assistance d'un interprète et à la traduction de certaines pièces de la procédure » (art. D. 594 à D. 594-11, C. pr. pén.).

Le décret précise que si cette personne n’a pas demandé à bénéficier de l’assistance d’un interprète mais qu’il existe un doute sur sa capacité à parler ou comprendre la langue française, l’autorité doit s’assurer qu’elle parle et comprend cette langue. S’il apparaît que ça n’est pas le cas, l’assistance de l’interprète doit intervenir sans délai. Le décret prévoit une liste des pièces essentielles à traduire pour permettre à la personne d’avoir connaissance des faits qui lui sont reprochés. Exceptionnellement, les pièces de procédure peuvent faire l’objet d’une traduction orale ou d’un résumé oral. Sont également prévues les modalités de désignation de l’interprète ou du traducteur.

Il est en outre prévu que les dispositions relatives au droit à un interprète lors des auditions et lors des entretiens avec un avocat s'appliquent aux personnes présentant des troubles de la parole ou de l'audition qui pourront être assistées par un interprète en langue des signes ou par une personne qualifiée maîtrisant un langage, une méthode ou un dispositif technique pour communiquer avec elles.



En complément des ouvrages suivants : 

lundi 2 décembre 2013

Civ. 1re, 23 octobre 2013 (n°12-17896) : inopposabilité des actes accomplis sur les biens par un époux seul postérieurement à l’assignation


Dans un arrêt du 23 octobre 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation affirme qu’en application de l’article 262-1 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, « dans les rapports entre époux, le jugement de séparation de corps qui emporte dissolution de la communauté prend effet au jour de l’assignation, de sorte que la consistance de la communauté est fixée à cette date ». Par conséquent, les actes accomplis par un seul des époux postérieurement à cette date sont inopposables à l’autre.



Dans les revues : D. 2013, 2517, D. 2014, Jur. p. 522, note V. Brémond, JCP 2013, 1164

En complément des ouvrages suivants : 

Crim., 5 novembre 2013 (n°13-82682) : la renonciation à un avocat pendant la garde à vue n’est jamais définitive


Placé en garde à vue, un individu déclare, lors de la notification de ses droits, ne pas souhaiter s’entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue. Le lendemain, lors d’une audition sur les faits, il déclare finalement vouloir être assisté. L’audition se poursuit sans que l’intéressé soit assisté. Ce n’est que lors de la prolongation que l’homme peut finalement bénéficier de l’assistance d’un avocat.
La chambre de l’instruction refuse d’annuler la garde à vue, au motif que l’homme avait renoncé à un avocat pour sa première garde à vue et que le droit à un avocat ne lui était de nouveau ouvert qu’au moment de la prolongation.

La Cour de cassation casse, au visa de l’article 63-3-1 du Code de procédure pénale, estimant qu’il appartenait à la chambre de l’instruction « après avoir constaté que les auditions recueillies postérieurement au moment où le mis en examen avait sollicité l’assistance d’un avocat étaient irrégulières, de les annuler et, le cas échéant, d’étendre les effets de cette annulation aux actes dont elles étaient le support nécessaire ».
La renonciation à un avocat pendant la garde à vue n’est donc jamais définitive. Le prévenu doit être assisté par un avocat dès qu’il en fait la demande.

Autre arrêt dans le même sens :  Crim. 14 déc. 2011 (n° 11-81329), Bull. crim. n° 256, AJ pénal 2012. 170, obs. J. Gallois, Dr. pénal 2012, n° 44, obs. A. Maron et M. Haas.


En complément des ouvrages suivants : 

Projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans le domaine de la justice et des affaires intérieures : mesures de simplification et de clarification du droit civil

La Garde des sceaux, ministre de la Justice, a présenté le 27 novembre 2013 en Conseil des ministres un projet de loi visant à moderniser, simplifier et clarifier le droit et les procédures pour faciliter la vie des citoyens et des entreprises dans leurs relations avec la justice. Le projet de loi, enregistré à la présidence du Sénat le 27 novembre 2013, habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification du droit et des procédures relativement au droit civil, au tribunal des conflits, à la communication par voie électronique, au cinéma et à l‘image animée ainsi qu’aux procédure administratives. Les dispositions relatives au droit civil sont les suivantes :

ARTICLE 1 : MODIFICATION DES RÈGLES RELATIVES À L'ADMINISTRATION LÉGALE ET À LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS.
● Simplification des règles relatives à l'administration légale:
- suppression du contrôle systématique du juge lorsque l'un ou l'autre des parents est décédé, ou se trouve privé de l'exercice de l'autorité parentale ou en cas d'exercice unilatéral de l'autorité parentale ;
- clarification des règles applicables au contrôle des comptes de gestion.
● Aménagement du droit de la protection juridique des majeurs
- possibilité pour le juge de prononcer des mesures initiales pour une durée supérieure à cinq ans en l'absence manifeste d'amélioration prévisible de l'état de la personne à protéger;
- simplification les modalités d'arrêt du budget ;
- rôle privilégié donné, selon le cas, au conseil de famille, au subrogé tuteur ou du subrogé curateur dans le contrôle des comptes de gestion des mesures de protection ;
- diversification des auteurs et des modalités de l'avis médical requis par l'article 426 du code civil lorsqu'il est disposé du logement ou des meubles de la personne protégée ;
- création d’un dispositif d'habilitation par justice au bénéfice des membres proches de la famille d'un majeur hors d'état de manifester sa volonté, permettant de le représenter ou de passer certains actes en son nom sans qu'il soit besoin de prononcer une mesure de protection judiciaire.

ARTICLE 2 : DIVERSES DISPOSITIONS AFIN DE SIMPLIFIER LE DROIT EN MATIÈRE DE DROITS DES SUCCESSIONS ET DE RÉGIMES MATRIMONIAUX

●Possibilité pour les  personnes sourdes ou muettes la possibilité à la forme authentique pour établir leur volonté testamentaire.
●Simplification  des modalités de changement de régime matrimonial en présence d'enfants mineurs.
●Articulation, en cas de divorce, de l'intervention du juge aux affaires familiales et la procédure de liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des époux.
●Instauration d’un nouveau mode de preuve simplifié pour justifier de la qualité d'héritier dans les successions d'un montant limité.

ARTICLE 3 : MODIFICATION DE LA STRUCTURE ET DU CONTENU DU LIVRE III DU CODE CIVIL AFIN DE MODERNISER, DE SIMPLIFIER, D'AMÉLIORER LA LISIBILITÉ, DE RENFORCER L'ACCESSIBILITÉ DU DROIT COMMUN DES CONTRATS, DU RÉGIME DES OBLIGATIONS ET DU DROIT DE LA PREUVE, DE GARANTIR LA SÉCURITÉ JURIDIQUE ET L'EFFICACITÉ DE LA NORME 

●Affirmer les principes généraux du droit des contrats tels que la bonne foi et la liberté contractuelle. 
●Énumérer et définir les principales catégories de contrats.
●Préciser les règles relatives au processus de conclusion du contrat, y compris conclu par voie électronique, afin de clarifier les dispositions applicables en matière de négociation, d'offre et d'acceptation de contrat, notamment s'agissant de sa date et du lieu de sa formation, de promesse de contrat et de pacte de préférence.
●Simplifier les règles applicables aux conditions de validité du contrat, qui comprennent celles relatives au consentement, à la capacité, à la représentation et au contenu du contrat, en consacrant en particulier le devoir d'information, la notion de clause abusive et en introduisant des dispositions permettant de sanctionner le comportement d'une partie qui abuse de la situation de faiblesse de l'autre.
● Affirmer le principe du consensualisme et présenter ses exceptions en indiquant les principales règles applicables à la forme du contrat.
● Clarifier les règles relatives à la nullité et à la caducité, qui sanctionnent les conditions de validité et de forme du contrat.
● Clarifier les dispositions relatives à l'interprétation du contrat et spécifier celles qui sont propres aux contrats d'adhésion.
● Préciser les règles relatives aux effets du contrat entre les parties et à l'égard des tiers, en consacrant la possibilité pour celles-ci d'adapter leur contrat en cas de changement imprévisible de circonstances.
● Clarifier les règles relatives à la durée du contrat.
● Regrouper les règles applicables à l'inexécution du contrat et introduire la possibilité d'une résolution unilatérale par notification.
● Moderniser les règles applicables à la gestion d'affaires et au paiement de l'indu et consacrer la notion d'enrichissement sans cause.
● Introduire un régime général des obligations et clarifier et moderniser ses règles :
- préciser en particulier les règles relatives aux différentes modalités de l'obligation, en distinguant les obligations conditionnelles, à terme, cumulatives, alternatives, facultatives, solidaires et à prestation indivisible ;.
- adapter les règles du paiement et expliciter les règles applicables aux autres formes d'extinction de l'obligation résultant de la remise de dette, de la compensation et de la confusion.
● Regrouper l'ensemble des opérations destinées à modifier le rapport d'obligation.
- consacrer dans les principales actions ouvertes au créancier, les actions directes en paiement prévues par la loi.
- moderniser les règles relatives à la cession de créance, à la novation et à la délégation ; 
- consacrer la cession de dette et la cession de contrat.
- préciser les règles applicables aux restitutions, notamment en cas d'anéantissement du contrat ;
● Clarifier et simplifier l'ensemble des règles applicables à la preuve des obligations :
- énoncer les règles relatives à la charge de la preuve, aux présomptions légales, à l'autorité de chose jugée, aux conventions sur la preuve et à l'admission de la preuve ;
- préciser les conditions d'admissibilité des modes de preuve des faits et des actes juridiques ;
- détailler les régimes applicables aux différents modes de preuve.

Le Gouvernement sera autorisé par à aménager et modifier toutes dispositions de nature législative permettant d'assurer la mise en œuvre et de tirer les conséquences des modifications apportées en application de ces trois articles.



Les ordonnances doivent être prises dans un délai de :
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de :
Article 1er (mineurs et majeurs protégés)
8 mois

6 mois
Article 2 (Successions et régimes matrimoniaux)
8 mois
Article 3 (droit des contrats)
12 mois